Petrus Regout

« Petrus était plutôt belge »
Ber Crouzen. De Limburger 26 juin 1992

Petrus Regout est considéré comme le fondateur de l’industrie céramique et un des premiers « entrepreneurs » de ce qui s’appellera plus tard les Pays Bas.

Malgré cela, l’histoire n’a pas toujours été tendre avec lui. L’expansion de ses usines fut remarquable, mais le fait d’employer une main d’oeuvre très jeune et  » d’assigner à résidence  » ses ouvriers, lui valut de graves reproches de la part de la droite catholique représentée par Henri Poels.

Ad van Iterson, de l’Université du Limbourg, a rédigé une étude sur Petrus Regout.

 » Si l’on veut comprendre Petrus Regout, il faut tenir compte de l’environnement de l’époque. L’homme qui fut à l’origine de l’industrie à Maestricht, était plus belge que néerlandais et avait été formé à la culture latine .  » C’est ainsi que Ad van Iterson condense son avis sur Petrus.

Le jeune Regout était acheteur de verre pour le magasin de porcelaine et verres que tenait sa mère. Ce qui l’amenait régulièrement en Belgique, et lui faisait connaître l’industrie verrière qui se développait à l’époque. Mais, au delà de ses voyages, dans sa sphère maestrichtoise et parmi ses relations il recevait une formation nettement plus française que néerlandaise .

Les anciennes valeurs

Ces expériences l’ont, selon van Iterson, fortement marqué.

 » De mentalité, Petrus Regout était Ancien Régime , absolument pas Révolution Française, et donc fortement imprégné des anciennes valeurs. Catholique, royaliste et papal .  »

Il était modérément attiré par le libéralisme naissant.

 » Paternaliste, il savait ce qui était le meilleur pour ses enfants et ses ouvriers. « 

Dans la Hollande lointaine, on le regardait avec méfiance. Il ne correspondait pas à l’image du commerçant, âpre au gain, indifférent au protectionnisme, et peu attaché à un comportement hiérarchisé.

Pour affirmer cela, van Iterson se base sur une étude réalisée parmi plusieurs pays européens.

Il apparaît que les commerçants hollandais étaient plus enclins que les belges à prendre des risques.

 » Vu de l’extérieur, Regout était un homme à prendre des risques, mais en réalité il était peu sûr de lui ; c’est une des explications à son acharnement à s’attacher par tous les moyens les ouvriers qu’il employait.  »

C’est la raison également pour laquelle il avait instauré la paie par quinzaine. Il tenait mieux ainsi son personnel.

On se souvient aussi de ses passages, en bonnet de nuit, dans les ateliers pour surveiller la production.

Il y eut également la construction du  » Groete Bouw  » , dans la rue St Antoine, de logements sociaux qualifiés plus tard par Poels « d’entrepôt de personnel « , qui reflétait la volonté de garder l’emprise sur ses ouvriers, d’après van Iterson.

Très riche

Petrus a toujours été ignoré par la société maestrichtoise de l’époque et même les efforts qu’il entreprit pour amener un certain bien-être dans une ville appauvrie par la Révolution Belge de 1830, en créant diverses industries , ne furent pas estimés à leur juste valeur.

Par tous les moyens, l’administration communale imposa des tracasseries administratives à ce nouveau riche , écrit van Iterson.

Cela n’empêcha pas Petrus d’imposer son empreinte sur le quartier de la Boschstraat.  » Un point vital au centre de la ville ».

La méconnaissance de ses mérites ont été à la base de sa mégalomanie ultérieure. Les constructions de grandes villas pour ses fils et la célébration de ses noces d’or au Château de Vaeshartelt, en sont les manifestations.

Double Personnalité

 » Le vieux Regout était et reste une figure ambigüe , difficile à cerner  » reconnaît van Iterson.

En tant qu’entrepreneur, un tout grand homme. En tant que  » social manager  » , il y avait à redire.

 » Les conditions de travail de ses ouvriers étaient mauvaises, certes, mais pas pires que dans les pays environnants.

Si ça s’était passé en Belgique, la critique aurait été moins dure.

On aurait trouvé normal qu’un industriel agisse ainsi , comme un père vis à vis de ses jeunes ouvriers.

On peut critiquer ce paternalisme, mais ce n’est rien à côté du libéralisme effréné dans lequel se sont lancés ses fils .

Petrus ne s’y serait pas trouvé à l’aise. «